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18 septembre 2023 1 18 /09 /septembre /2023 01:00

J

e viens de recevoir une publicité pour le dernier numéro du magazine d’origine évangélique Jésus !, dont le rédacteur en chef a été le footballeur Olivier Giroud.

 

Sa photographie figure en gros plan en couverture, avec comme légende : « 33 ans, l’âge du Christ ». C’est, me dit-on, « un numéro histori­que, à conserver et à offrir, le cadeau indispensable pour les fans de Jésus, de foot et... de Giroud. »

 

Je me suis donc empressé de lire l’éditorial du nouveau rédacteur en chef, et je n’ai pas été déçu.

 

Il est empreint d’une « jésulâtrie » constante. Jésus y est convoqué à chaque ligne, comme dieu et origine de toutes choses. Giroud dit qu’il porte lui-même comme tatouage un passage des Psaumes : « L’Éternel est mon berger, rien ne saurait me manquer »

 

Voici comment il le commente : « Ces mots gravés sur mon bras me rassurent. Je sais que si j’ai besoin de quoi que ce soit, d’une aide, je peux le prier, lui, Jésus. » Il va même jusqu’à dire qu’il lui arrive de le prier en plein match, pendant quelques secondes : « Et qui sait si sur le centre d’après, lorsque je choisis de couper au premier poteau, ce choix n’est pas directement inspiré par Dieu lui-même ? »

 

Voici donc les réflexions que je me fais. D’abord il faut que le souci de gagner à tout prix de l’argent soit bien grand, pour que ce magazine convoque un footballeur, même « champion du monde », pour augmenter son tirage.

 

Ensuite la « théologie » de Giroud est bien approximative, pour qu’il assimile le Dieu biblique des Psaumes à Jésus lui-même, dont la divinisation finale n’est d’ailleurs toujours pas admise par certains chrétiens, unitariens, arianistes et pré-nicéens par exemple.

 

Il oublie en outre que ce dernier, qu’il sent constamment à ses côtés, est en réalité une figure construite par les projections de disciples et des siècles de foi, et que, comme il n’a rien écrit, il est une forme vide, comme Socrate qui n’est connu que par ses disciples et contemporains (Platon, Xénophon, Aristophane...). Pour lui, il est comme un Grand Frère qui veille sur lui, qui comme il le dit le rassure et l’apaise.

 

Enfin la publicité du magazine est un modèle de démagogie, en mêlant tout ensemble les fans de Giroud, du foot, et ceux de Jésus. Ce nivellement des plans est significatif de notre modernité.

 

Je trouve bien sûr cette approche et cette vision tout à fait infantiles, mais je ne doute pas qu’elles puissent trouver beaucoup d’échos chez certains. La presse évangélique utilise souvent cette démarche et ces recettes démagogiques. Il est quand même dommage que ce magazine s’appuie sur l’infan­tilisme de son rédacteur pour infantiliser ses lecteurs.

 

[v. Anthropomorphisme]

 

Article paru dans Golias Hebdo, 21 novembre 2019

 

D.R.

 

***

 

Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.

 

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16 septembre 2023 6 16 /09 /septembre /2023 01:00

L’

Église vient de rappeler à ses évêques les règles en vigueur pour le choix du pain et du vin pendant la messe. Elle ne veut pas d’hostie sans gluten, mais y admet l’introduction des OGM (Source : LePoint.fr, 08/07/2017)

 

Autrement dit, les personnes souffrant de maladie cœliaque, allergiques au gluten, et les écologistes hostiles aux OGM ne pourront communier. Cela fait beaucoup d’ostracismes !

 

Pour les catholiques, le pain et le vin deviennent réellement le corps et le sang du Christ pendant l’eucharistie, mais pour que s’opère cette transsubstantiation le pain doit être azyme (sans levain) et de pur froment, et le vin provenir de pur raisin, non aigri (transformé en vinaigre). Si ces deux conditions ne sont pas remplies, le sacrement ne s’accomplit pas (non conficitur sacra­mentum).

 

Je renvoie ici aux Instructions pour dire la Messe (Ordo Missae, Imprimerie du Vatican, 1965, en latin : pp.59-62). La matière est plus essentielle que la personnalité même de l’offi­ciant : si celui-ci est en état de péché mortel, si aussi il prononce les paroles liturgiques pour s’en amuser (delusorie), pourvu que ces dernières et le rite soient bien observés, valable est le sacrement (ibid., p.63) !

 

Par exemple les Donatistes du 4e siècle, qui pensaient qu’un sacrement était invalidé par l’indignité de celui qui l’administre, ont été attaqués par saint Augustin et décrétés hérétiques.

 

Que ne connaît-on l’histoire, pour relativiser tout cela ! Déjà l’opposition entre les partisans du pain sans levain (azymites), et ceux du pain levé (fermentaires) a été une des causes au 11e siècle de la séparation des églises chrétiennes d’Occi­dent et d’Orient.

 

Ensuite sur la signification de la présence réelle du corps du Christ sur l’autel on a hésité pendant tout le premier millénaire. On disait prudemment que cette présence se faisait d’une certaine manière (super quemdam modum), sans plus. Ses conditions matérielles n’ont été fixées par Rome qu’à partir du Concile de Trente, contre les protestants réformés qui voyaient dans la dernière Cène un sens non littéral, mais symbolique.

 

Et on connaît la fameuse Querelle des rites, des 17e et 18e siècles, où Rome a refusé que les missionnaires puissent utiliser pour la messe d’autres matières que le pain et le vin, inconnus des populations évangélisées.

 

Pourquoi s’obstiner ainsi sur une vision si matérialiste et réductrice d’un usage ? Perseverare diabolicum ! - v. : Eucharistie.

 

Article paru dans Golias Hebdo, 24 août 2017

 

#Hostie #Eucharistie #Transsubstantiation #Catholicisme
D.R. - #Hostie #Eucharistie #Transsubstantiation #Catholicisme

 

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Ce texte est extrait d'un des deux tomes de mon ouvrage Chroniques religieuses. Pour plus de détails sur ces deux livres, cliquer: ici.

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14 septembre 2023 4 14 /09 /septembre /2023 01:00

À propos du tremblement de terre qui a ravagé il y a quelques jours le Maroc, j’ai entendu plusieurs rescapés remercier Dieu d’en avoir réchappé. Pour moi cela m’a fort surpris. Je m’attendais sinon à une révolte, du moins à un silence plus ou moins méprisant, pouvant porter condamnation à ce qui était arrivé. Fidèle au Si Deus est, unde malum ? (« Si Dieu existe, d’où vient le mal ?), je voyais dans le séisme une raison de s’insurger, de ne pas croire, un peu comme ce fut le cas pour beaucoup d’esprits devant celui de Lisbonne, au XVIIIe siècle. Mais non, la foi chevillée au corps de ces fidèles n’a pas été effleurée par le doute. L’obtention d’un salut personnel a fait justice de tout le reste.

 

Même chose à propos du séisme qui s’est produit en Turquie en février dernier. Les malfaçons ayant causé l’écroulement d’un grand nombre de maisons, on se serait attendu à ce que les habitants cherchent les responsabilités, demandent des comptes aux politiques corrompus. Mais non, quelque temps après le même président a été élu, et le même système a pu perdurer. Le fatalisme a tout emporté. On ne s’attache pas à maîtriser ce qui arrive, puisque c’est Dieu qui s’occupe de tout.

 

Ce fatalisme foncier se trouve aussi dans l’Évangile. « Et qui d’entre vous peut, par son inquiétude, prolonger tant soit peu son existence ? » (Matthieu, 6/27) Le moindre de nos cheveux est compté, et si rien n’est possible à l’homme, à Dieu tout est possible (ibid. 19/26).

 

Cette attitude propre au premier christianisme et à l’islam, caractérise cette âme « magique » dont parle Spengler dans Le Déclin de l’Occident, pour l’opposer à l’âme grecque ancienne, caractérisée par l’insouciance des grands enfants, et à l’âme faustienne de l’Occident moderne, faite d’élan vers un désir infini. Et la résume la soumission qui clôt le livre de Job.

 

Mais nous avons du mal chez nous à nous soumettre ainsi, pour nous soumission n’est pas résignation, comme le dit Hugo dans À Villequier. La sensibilité et aussi la raison continuent de réclamer leur part de contestation.

 

Le fatalisme oriental permet sans doute de trouver la paix : islam veut dire soumission, et la paix qu’on y trouve. Il est différent de notre âme inquiète et interrogeante. Pourtant nous ne pouvons nous empêcher de penser, parfois, qu’il a poussé bien loin le sacrificium intellectus, le sacrifice de l’esprit qui doute.

 

D.R.

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  • Agrégé de lettres, professeur honoraire en khâgne et hypokhâgne, écrivain, photographe, vidéaste, chroniqueur et conférencier (sujets : littérature et poésie, stylistique du texte et de l'image, culture générale et spiritualité).
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